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La Faucheuse. de T-Tylon



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» Auteur : T-Tylon - Voir le profil
» Créé le 01/03/2011 à 18:35
» Dernière mise à jour le 01/03/2011 à 18:35

» Mots-clés :   Présence d'armes   Sinnoh   Suspense   Terreur

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Premier Sang.
(Troisième partie)

Sinnoh. Partie Sud de la chaine de montagne Couronnée. Base Echo 1 de Rising Sun. Labo d'étude et d'expérimentation 2, secteur Béta.

Jeudi 22 Avril, 21 heures 04 minutes.



Contrairement à la salle des serveurs (bien qu'il ne le sache pas encore) la lumière et le son agressants de l'alarme le suivait encore dans son entrée dans la pièce. Mais il ne la notait presque plus alors qu'il était exclusivement concentré à trouver l'origine de ce bruit au profit de tout autre.

Le rouge menaçant ne lui permettait pas d'appréhender toutes les subtilités du lieu. Mais il pouvait tout de même constater qu'il ne se trouvait pas dans une salle ordinaire : des microscopes, des tubes à essais –dont certains brisés au sol-, quelques ordinateurs avec des fiches de travaux en désordre, des bureaux aux tiroirs ouverts et vidés à la va-vite, des appareils d'origine difficile à déterminer et plein d'autre choses dont il n'avait tout autant le temps que l'envie d'en découvrir la nature. Plus d'autres portes semblant mener à d'autres pièces.

L'une d'elle menait à une salle remplit de différents appareil électronique plutôt massif qui le faisait penser à un service d'analyse médicale, d'où il pouvait l'observer depuis la baie vitrée –probablement renforcée- qui permettait une observation «sans risque» pour ceux se situant derrière ; salle dont il détourna le regard en notant les marques de sang presque frais sur un lit à sangle multiple et au sol. Dont il semblerait à peine qu'on se soit occupé à les effacer avant qu'un imprévu ne vienne aux auteurs de les délaisser pour s'occuper d'affaires plus urgentes… Un endroit glauque dont il ne viendrait pas à en regretter la disparition.

Par défaut, en détournant le regard, il se dirigea vers la seconde porte à l'opposé de la salle qui semblait munie d'une sécurité plus élaborée : digicode et scanner rétinien. Un instant il pesta en remarquant que le bruit qu'il entendait semblait venir de cet endroit, dont seul la pokémontre de sa collègue pourrait en percer le mécanisme d'ouverture. Mais, alors qu'il regardait la serrure en question, il remarqua que cette dernière était éteinte ; complètement HS. Il sortit son petit stylet et, d'un geste technique bref, en fit passer la fine extrémité par l'interstice d'espace de fermeture de la porte en espérant que, bien qu'informatique, le mécanisme n'en demeure pas moins physiquement sensible au crochetage. Ce qui n'était pas le cas, mais n'était pas pour autant un problème : la porte suivit le mouvement d'elle-même au moment où il en saisit la poignée.

Alors qu'elle s'ouvrait lentement, il comprit pourquoi : la fermeture de la porte était composée de deux plaques magnétique s'emboitant parfaitement l'une sur l'autre et qui, soumises à un courant électrique lorsque la porte était fermée, généraient un fin champ magnétique puissant au point qu'il devenait impossible de les séparer l'une de l'autre. Mais en l'absence de courant, elles n'offraient plus aucune résistance.

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En pénétrant dans la pièce, plus que l'obscurité qui y régnait, l'odeur du sang qui lui parvint au nez le fit se forcer à déglutir difficilement. C'était si fort qu'il faillit en vomir sous l'effet du contraste avec l'environnement derrière lui. Il remarqua aussi avec une pointe d'effroi l'origine de cette odeur, en réalisant que la couleur de la marre de liquide répandue au sol n'était pas due à un effet de la lumière d'alarme, et que la forme de l'ombre allongée en son milieu n'était pas la sienne.

Il se mit à y progresser prudemment pour éviter de glisser, alors que seule la lumière qui pénétrait par l'ouverture lui apportait une visibilité limitée dans son rayon d'action ; ses pas ponctués par le clapotement lugubre du liquide sous ses pieds. Il ne vit que des rangées de cages qui occupaient la pièce, assemblées les unes sur les autres comme la bibliothèque effroyable d'un scientifique fou dans laquelle il venait piocher ses sujets de test comme autant de livre ; un véritable frisson silencieux le traversa alors qu'il discernait les silhouettes silencieuses et immobiles de leurs occupants, d'où s'écoulait d'un calme morbide depuis certaine les mêmes fluides qui ponctuaient sa marche.

Finalement il arriva au bout de la salle, dont la taille pourtant réduite n'empêchait en rien à l'homme de la trouver toujours trop grande pour l'horreur qu'ellercèle ; le véritable sentiment de répression qu'il y ressentait lui donnait l'impression de s'être engouffré dans un couloir sans fin. Mais à sa grande surprise, alors qu'il se trouvait devant le mur du fond de la pièce, le bruit avait disparut.

Il ne savait pas quoi penser alors qu'une foule de possibilité et de sentiments contradictoires s'emparaient de lui ; s'il était arrivé trop tard, ou au contraire si la directrice avait eut raison sur une origine électronique qu'il aurait désactivé sans le savoir... Mais tous les points s'accordaient à lui faire réaliser la même conclusion : il avait fait tout ça pour rien…

Puis à nouveau il entendit quelque chose, un bruit ; un son si timide et ténu que c'était presque un miracle qu'il parvenait à l'entendre… Un bruit proche du sol. Il se pencha pour essayer de mieux le discerner. Mais comme plus aucun bruit ne se fit, il pensa que l'origine ne pouvait venir que des cages occupant les dernière place ; plus précisément celle de gauche. Il sut que c'était effectivement le cas en entendant à nouveau ce très faible bruit, puis il déglutit silencieusement en réalisant compte qu'il n'avait aucun moyen d'en vérifier la source autrement qu'en s'agenouillant.

Au diable ses vêtements : il n'avait pas fait tout ce chemin et tout ce cinéma sur la nécessité que représentait pour lui le fait de sauver quelqu'un lorsque celui-ci appelait à l'aide, pour finalement rebrousser chemin quand un obstacle aussi «futile» lui barrait la route. S'il devait saloper définitivement ses affaires pour vérifier que ses doutes soient fondés ou non, il le faisait ; au moins pour s'en assurer et avoir l'esprit tranquille.

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Bien que ses pantalons gris certifiés imperméable devaient voir l'eau glisser à leur surface au simple contact, ils prirent immédiatement la teinte du sang lorsqu'ils trempèrent dans sa consistance plus poisseuse que l'eau. Il n'en avait cure, car la seule chose qui le préoccupait était de déterminer ce qui se trouvait dans la cage. Mais hélas elle était enfoncée dans une obscurité presque totale qu'il l'empêchait de voir plus loin que les barreaux qui l'ornait.

C'est ainsi qu'avec le stylet il sortit une lampe de poche, celle qui lui avait offerte son mentor : «toujours voir et savoir où tu vas et ce que tu fais» avait-il beaucoup insisté ; ce qui était vital concernant ses talents de serrurier. Si ce dernier voyait désormais où il se trouvait, il se demandait bien à quel point il pourrait se rendre compte de toute la valeur de son conseil.

C'est alors qu'il la pointa dans l'obscurité de la cage et l'alluma, pour découvrir quelque chose qui le laissa sans voix.

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Recroquevillé au fond de sa prison dans une posture craintive, la victime (il n'y avait pas d'autre mot) tremblotait dans son coin comme une frêle feuille d'automne remuée par une brise silencieuse de soirée. La couleur terne du duvet de sa crinière montrait clairement qu'elle avait connue des jours meilleurs, et son pelage ébouriffé accusait le poids du stress et de la fatigue accumulées à rester prostré dans cet endroit infâme ; alors que sa queue étaient trempée et recouverte de ses propres excréments là où il se trouvait. L'odeur qui lui parvenait au nez se mélangeant durement avec celle du sang déjà présent.

La soudaine lumière perçant la pénombre de sa geôle le força à s'en protéger les yeux tant bien que mal, mais par réflexe le pauvre petit être s'était de toute façon renfermé sur lui dans le futile espoir de se protéger de ses tourmenteurs ; sachant pourtant que cela ne lui permettait même pas de gagner une seconde.

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Par chance, ou malédiction, ses geôliers ne le sélectionnaient que très rarement pour lui faire subir un traitement dont il n'espérait à chaque fois ne plus jamais à connaitre à nouveau. Mais en conséquence il ne sortait jamais de sa cage, et restait là à assister impuissant aux résultats terribles qui affligeaient tous les autres malheureux enfermés avec lui : Certains hurlaient de douleur au point que leurs tourmenteurs les sélectionnaient une dernière fois sans jamais qu'ils ne reviennent dans leurs cages ; d'autres devenaient fous par la peur au point qu'ils leur épargnaient cette peine en se scarifiant et mettant eux-mêmes fin à leurs souffrances. Chaque jour se suivait et se ressemblait comme une éternité passée dans un enfer effrayant dont la seule issue était la mort.

Puis, brisant les ténèbres de ce quotidien, un bruit inhabituel mais angoissant s'était mit à résonner depuis l'autre côté de la porte les séparant de l'enfer, et les humains qui les retenaient prisonniers s'étaient mis à paniquer et s'agiter dans tous les sens. Juste avant ils avaient emmené un autre d'entre eux dans cet éternel manège macabre. D'aussi loin qu'il se souvenait encore de sa vie en forêt, jamais il n'avait encore rencontré de pokémon comme celui-ci –comme une bonne partie des autres présents avec lui. Il n'en reconnaissait pas l'espèce, mais savait qu'elle devait être pacifiste vu son physique allongé qui ne semblait pas taillé pour le combat -plutôt pour la sieste. C'est avec ce dernier qu'un de leur geôlier parut de blanc revint ; l'air tout aussi paniqué que les captifs ne l'étaient à chaque fois que l'un d'entre eux venait pour la sélection. Maladroitement, il tentait de remettre le pokémon dans sa cage alors qu'il cherchait en même temps la clé de cette dernière. Mais c'est à cet instant que, dans un éclair de lucidité ou de folie, le pokémon sortit de son état végétatif dans une furie aveugle innommable et s'en prit au scientifique, qui ne put que se faire éviscérer sur place dans un cri guttural de douleur.

Comme si cela pouvait être possible, un nouveau pallié de terreur venait alors d'être atteint. Les humains, se rendant compte qu'un de leur sujet s'était échappé de sa cage en tuant un de leur semblable, se mirent immédiatement à fermer la porte pour empêcher la bête de s'en prendre à leur tour à eux. Ce qui ne servit à rien ; juste avant que la porte ne se referme, conscient ou non de son geste, le pokémon s'ouvrit la gorge avec ses propres griffes pour mettre fin au massacre dans une continuité sanglante.

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Ils n'étaient alors plus que cinq dans la prison. Cinq prisonniers qui, comme lui, étaient au bord de céder à la folie. Bien que sa position ne lui permettait pas de les voir, il pouvait les entendre gémir, haleter, glapir faiblement, ou gargouiller bruyamment. Le premier d'entre eux à trépasser le fut dans une condition épouvantable qui le fit uriner sans contrôle dans son pelage à la simple entente de son agonie qu'il savait lente et douloureuse ; appelant désespérément à l'aide au travers de gargouillis immondes alors qu'il ne le voyait pas se noyer dans l'écume de ses propre fluides qui se répandaient dans sa bouche. Le second se tut dans une condition diamétralement opposée, lorsqu'il se contentait d'haleter de plus en plus vite pour supporter le poids lui comprimant la poitrine, avant que son cœur ne le lâche dans une crise cardiaque foudroyante.

Il n'était plus que trois. Jusque là, malgré l'horreur qu'ils leurs faisaient subir, les humains s'assuraient toujours qu'aucun d'eux ne meurt autrement que par leurs expérimentations ; bien qu'il ne savait pas comment ils arrivaient toujours au bon moment pour s'occuper de ceux qui souffraient les plus atrocement (ceux se suicidant ne le faisant que lorsqu'ils en avaient l'occasion.) Mais là ils ne revenaient pas, et la porte restait définitivement fermée.

Parmi les deux autres pokémons qui restaient, il y'avait le seul qu'il pouvait aussi bien voir qu'entendre : celui situé dans la cage en face de lui. Son pelage anarchique en zigzag de marron et de beige était plus mité que le sien. Et, bien qu'il le regardait fixement, ses yeux étaient vitreux et contemplaient dans le vide alors qu'il n'arrêtait pas de gémir faiblement. Il se mit tout d'un coup à gigoter mollement, puis de plus en plus fort alors que son organisme était parcourut de spasmes incontrôlables ; dont il n'arrivait pas à détacher les yeux. Puis, aussi soudainement et violemment qu'ils étaient apparus, les spasmes cessèrent… Et il ne bougea plus.

C'est à cet instant qu'il se rendit compte que sort pire que la mort, c'était de mourir seul. Sans savoir qu'au moins une personne ne connaisse sa fin, et soit présente avec lui lors du moment fatidique. Pour qu'au moins son nom reste dans l'esprit d'un autre avant de partir à son tour. En cela il avait beau savoir que les humains étaient responsable de sa condition, de tous les morts présents autour de lui étaient intégralement de leur faute, il avait beau les maudire de toute la fureur de son âme rongée par la peur et de vouloir qu'ils payent pour leurs crimes : il souhaitait désespérément de tout cœur qu'au moins un seul d'entre eux revienne et ne le laisse pas comme ça.

Ils s'étaient alors mis à crier, à crier avec toutes les forces qu'il leur restait et qu'ils pouvaient rassembler pour espérer qu'on les entende. Ils criaient à n'en plus pouvoir. Ce qui fut le cas pour l'un d'entre eux ; lorsqu'il nota que le seul cri qui lui parvenait en retour était le sien, il s'arrêta un instant pour essayer d'entendre le dernier captif qui restait…

Et de se rendre compte qu'il ne restait que lui.

Le choc fut plus terrible que tout ce qu'il avait subit alors jusqu'à présent. Mais, comme si le monde entier lui en voulait personnellement en devant absolument le torturer au-delà de toute possibilité, c'est alors que les lumières de la pièce s'éteignirent, la plongeant dans l'obscurité la plus totale. Dans laquelle il s'était tétanisé ; ne bougeant plus dans sa cage en réalisant la scène de son pire cauchemar.

Un silence de mort, l'odeur du sang, un noir de ténèbres. Plus entouré désormais que par les cadavres et la tourmente. La folie l'ayant même abandonné à son sort. Alors qu'il craignait, à l'image des autres, que même son propre corps vienne à le trahir à n'importe quel instant pour mettre fin à tout cela de la pire manière qui soit.

Il était seul.

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Puis le bruit qui brisa le son de cet enfer, plus terrible et menaçant que le premier. Un son agressant dont la nature pourtant fatale lui apparut comme la dernière chose à laquelle il pouvait se raccrocher, gageant l'espoir qu'il devait rester au moins quelqu'un en conséquence.

Il cria des dernières forces qui lui restaient, s'époumonant et se fatiguant encore d'avantage. Il ne lui restait que ça. Il criait à l'aide, appelait n'importe qui –même un humain-, du moment qu'il répondait à sa supplique désespérée. Puis, arrivant à bout de force, il se rendit compte que ce bruit était bien trop fort pour que sa faible voix ne rivalise avec lui et ne puisse parvenir à qui que ce soit.

Il s'arrêta, épuisé et résigné à son triste sort. Acceptant la dure réalité en offrant sa reddition, n'ayant plus aucune résistance à opposer. Il se détourna des barreaux pour s'en retourner dans la cage qui devint son injuste tanière depuis un temps qu'il ne se souvenait plus, et qui allait devenir son cercueil. Il s'allongea sur le fond, recroquevillé sur ses propres déjections ; n'étant plus au fait de l'hygiène ou dérangé par l'odeur. Les larmes coulant abondamment de ses grands yeux lisses aux formes d'opale pour aller s'écraser et se mélanger à son urine dans un faible clapotis lamentable.

N'attendant plus que la mort vienne le prendre.

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Puis la lumière se fit à nouveau, rouge, et le bruit alarmant, plus clair. Alors que la porte s'ouvrait à nouveau. Il nota le changement en silence, n'esquissant pas un geste, tandis que lentement une présence semblait pénétrer à l'intérieur de la pièce. Une présence imposante ; dont le pas mesuré et calme malgré le bruit et l'horreur des lieux lui interdit toute réaction. Cette dernière se rapprocha surement, fatidiquement dans sa direction ; le bruit de son approche souligné par le clapotement de ses pas dans le sang. Jusqu'à s'arrêter au bout de la pièce, de profil à sa cage.

Contrairement à tout ce qu'il pensait encore quelques minutes plus tôt, il n'était plus aussi sûr de vouloir que n'importe qui réponde à sa supplique. Il avait peur. Une peur comme il n'en avait jamais ressentit auparavant ; pas celle d'appréhender l'aspect de sa mort, mais de la reconnaitre présente devant lui. Peur au point qu'il faisait silence et n'émettait plus aucun bruit.

Mais, ne voyant pas la silhouette assurément humaine se pencher vers lui, sa peur se fit de moins en moins implacable alors que l'idée que l'humain ne retourne sur ses pas germait dans son esprit, et ne le laisse à nouveau seul. Il avait tant prié pour que quelqu'un réponde à son appel désespéré ; et alors qu'il était enfin exaucé, il regrettait son choix ? C'en était trop pour qu'il puisse le supporter et il craqua à son tour comme tant d'autres avant lui ; gémissant une dernière fois pour indiquer sa présence à l'imposante silhouette devant sa cellule. Qui que fut l'être responsable de son destin qui désirait à ce point là sa souffrance, il lui concédait sa victoire : il abandonnait.

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Aveuglé par la lumière et les larmes embuant sa vision, la chétive boule de poil gémit une dernière plainte à l'attention de son bourreau ; le suppliant vainement de lui accorder la miséricorde d'une mort rapide et indolore.


«liii…»


La silhouette silencieuse ne répondit pas. Restant muette, elle se mit à détourner légèrement le faisceau de lumière vers les barreaux pour diriger un étrange bâton au travers du curieux carré qui ornait chaque cage semblable à la sienne. Un déclic se fit entendre, et il nota que les barreaux s'ouvraient docilement en réponse à la silhouette ; le laissant complètement à sa merci…

Elle le prit lentement de ses mains pour le faire sortir de sa cage, le sortant de son cercueil putride. Il arrêta de trembler, arrivant au bout de son chemin. C'était finit.

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Mais au lieu de lui porter le coup de grâce comme il n'attendait plus autre chose, ne pouvant même plus prétendre à entrer en compétition avec un déchet tant il avait en commun avec ces derniers -rien qu'à l'odeur-, la silhouette n'en fit rien. Au contraire, en le tenant à bout d'un de ses bras, elle commença à défaire le vêtement supérieur, dont l'extension lui rappelait une curieuse forme de crinière qui cachait son apparence par rapport aux autres humains.

Puis, après en avoir retiré deux curieux bâtons noirs pour les ranger dans son vêtement des jambes, en le passant doucement de son bras encore protégé par son vêtement à son autre bras nouvellement mis à nu (comme ne notant même pas le contact de ses rejets corporels qui pourtant devaient être repoussants), le pokémon vit finalement la nature de l'humain qui lui permit de sortir de sa cage une dernière fois : le visage taillé comme par un Insécateur au talent indéniable, le teint clair malgré le ton rouge de la lumière, et le duvet sur sa tête aussi lisse que d'un jaune si brillant que la teinte rouge semblait répugner à en dénaturer sa nature à son contact.

Il fut interrompu dans sa contemplation alors que, lorsqu'enfin l'humain se défit de son vêtement, il l'y enroula délicatement dedans comme dans un couffin, et commença à se diriger hors de la pièce pour les amener tous deux vers la direction de la sortie. Jamais il n'avait été aussi loin depuis son emprisonnement ici, alors qu'il remarquait à nouveau la porte par laquelle il fut amené la première fois –l'impression que ça faisait une éternité-, et l'incroyable sentiment de légèreté qui l'envahissait alors qu'il voyait derrière celui qui le portait les portes de sa prison et de torture qui s'éloignaient de plus en plus ; comme un cauchemar qui se finissait enfin sans pour autant parvenir à s'en réveiller.

Finalement ils sortirent de la salle que les humains appelaient «laboratoire» pour se retrouver au beau milieu d'un couloir taillé et aménagé sommairement dans la roche ; la porte de tous ses malheurs se fermant derrière eux dans un bruit rendu si discret par celui alarmant qu'il ne l'eut pas entendu.

C'est à cet instant qu'enfin il put clairement voir celui qui l'avait sortit de cet enfer, lorsqu'il le regarda dans les yeux : un regard d'un jaune comme il n'en avait jamais vu. La seule comparaison qui lui venait à l'esprit était celle du soleil se levant chaque jour pour baigner le monde dans sa lumière en le sortant de la nuit, le réveillant et lui apportant l'élan d'espoir permettant aux êtres le peuplant de se lever et de marcher chaque jour leur vie inlassablement depuis la première aube ; le premier gardien : celui qui était le premier à briller et qui serait le dernier à s'éteindre.


«C'est finit maintenant, tu n'as plus rien à craindre.»

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Ces mots… Il n'arrivait pas pleinement à en saisir le sens, mais il en comprenait l'essence, et n'arrivait pas à les accepter. Encore il y'a peu, de l'humain tout ce qu'il connaissait était l'insensibilité cruelle dont il faisait preuve à l'égard d'autres êtres vivant -faisant même passer les effrayants Arboks ou les terribles Ursarings pour de misérables Toudoudous-, et semblaient animés par la seule soif de souffrance et la joie de donner la mort dans les pires aspects imaginables. Les humains qui l'avaient capturés et ceux qui l'ont torturés avaient tous en commun le même sourire satisfait au sujet de son sort ou de celui des autres pokémons : le sourire satisfaits de le voir acculé dans le piège pour ceux qui le lui avaient tendu, et de rire alors qu'il couinait désespérément qu'ils le laissent tranquille avant de le capturer ; le même sourire satisfait lorsqu'il fut révélé à la bande d'humain en blanc, et qu'il vit dans leurs yeux la même lueur du prédateur s'amusant avec sa proie ; le même sourire satisfait alors qu'ils lui injectaient pour la première fois leur venin avec leur espèce de dard, et qu'il le voyait rendu complètement abruti comme une baie flétrie en réponse à ses effets ; et encore et toujours ce même sourire alors qu'il le remettait dans sa cage pour le laisser se remettre durement des traitements subit avant que ce même manège ne recommence, encore et encore…

S'il n'était pas rendu aussi faible par tous ces traitements, si sa résolution n'avait pas été éparpillée en morceaux par le calvaire innommable qu'ils lui avaient fait subir, il lui aurait hurlé toute la rage de son être entier dans le flot ininterrompu d'un hurlement de rancœur ; maudissant jusqu'à la nature même d'avoir permit la création de toute sa race.

Mais il y'avait autre chose qui retenait son envie de vengeance. Quelque chose de moins évident et de plus subjectif qui, s'il haïssait les autres humains comme il ne se savait pas capable de ressentir pareille haine, le rendait incapable d'éprouver la même rancœur vis-à-vis de celui qui l'avait arraché à son triste sort : il n'arborait aucun sourire. Aucune forme de satisfaction qu'elle quel soit. A la place il lui affichait un visage qu'il voyait comme neutre, mais dont il reconnaissait une profonde tristesse dans son regard pour l'avoir tant vue dans feu celui partageant sa condition de pauvre cobaye dans la cellule face à la sienne ; dans lequel il pouvait parfois apercevoir son propre reflet dans ses yeux.

Tout ce qu'il y trouvait était de la tristesse, du remord, et de la peine. Mais pas des sentiments hypocrites s'accordant à dire inutilement le côté déplorable de la chose sans rien arranger, ou de prétexter avec arrogance savoir ce qu'il pouvait ressentir, ou encore prétendre partager honteusement la douleur qu'il n'appréhenderait même pas un jour en cauchemar dans sa vie. Non, à la place, ce qu'il y trouvait était la tristesse liée au réalisme de cette fatalité ; de reconnaitre que ces horreurs pouvaient arriver tout le temps, à n'importe quel moment, et rester à jamais impunies. Et de supporter en silence le poids accablant de cette réalité comme le fardeau de sa race dont il savait qu'il ne pourrait jamais s'en débarrasser.

Mais au-delà de sa peine, il trouvait dans son regard une essence déterminée à ne pas se laisser abattre et dominer par cet aspect fataliste. Une détermination à reconnaitre la peine et à ne pas fermer les yeux dessus pour chercher à la fuir lâchement. Une conviction que chaque personne aidée, chaque vie même infime arrachée à ce triste sort, est une victoire pour laquelle il méritait de se battre –qu'elle soit humaine ou non.

Il avait pénétré dans son enfer de tous les jours, né de la décadence de ses semblables. Il n'avait pas fermé les yeux sur les horreurs qu'il y avait trouvées, et s'y est aventuré en toute connaissance de cause. Il en avait vu et même sentit le résultat lorsqu'il le trouva dans sa cage, mais n'eut pas même produit le moindre son de gène à l'odeur alors qu'il sacrifiait sans la moindre hésitation son propre confort pour lui en faire gagner ne serait-ce qu'un peu plus en attendant de le sortir de sa prison. Il aurait pu le tuer sans difficulté ou même le laisser simplement mourir en silence tout seul, et personne n'aurait jamais rien su de cet endroit… Mais il ne l'a pas fait. Il ne pouvait pas ressentir de la haine envers lui. A la place, au contraire, il semblait se perdre dans son regard alors que la fatigue le rattrapait enfin ; se laissant bercer par l'étincelle de ses yeux lui rappelant le soleil au crépuscule, mais qui conservaient toujours l'éclat de son zénith. Avant de finalement s'endormir.

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Malgré l'alarme au bruit exaspérant dont le son tonitruant lui rappelait continuellement que le temps était une ressource trop précieuse pour être gâchée en futilité, l'homme se prit à sourire doucement en voyant que la petite boule de poil s'était assoupie dans ses bras envers et contre tout.

Il réajusta une dernière fois son couffin improvisé délicatement, ramenant la manche qui n'avait pas été touchée par ses excréments par-dessus ses yeux pour lui permettre de le protéger un peu mieux de la lumière. Puis se permit finalement d'énoncer une fine remarque à son attention avant d'aller au devant de sa collègue.


«Dors bien, petit Evoli.»


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Première pensée quand il pénétra dans la pièce des serveurs : sale pressentiment. Il s'y engouffrait lentement à pas de loup, autant par soucis pour la petite boule de poil entre ses bras que par réflexe dû à l'expérience. Le silence qui y régnait était inquiétant, parce qu'il savait qu'il devait s'y trouver sa collègue et qu'elle manifesterait sa présence au moins par un bruit quelconque. Mais rien. Un silence tranchant comme ceux qu'il n'aimait pas ; le même silence de transition la nuit où son mentor mena sa dernière enquête.

Le même genre de silence pour lequel il conservait toujours son premier ami en réserve.

Il était vrai qu'à sa ceinture strictement aucune pokéball n'était visible ; elle n'avait d'ailleurs absolument pas les mêmes encoches permettant aux dresseurs de les y accrocher. Ce qui expliquait pourquoi la championne ait fait la remarque. Mais cela ne voulait pas pour autant dire qu'il n'en avait aucune sur lui. Ainsi, à la boucle de ceinture, via une légère manipulation, il ouvrit le petit rangement secret qui s'y trouvait dans lequel reposait une pokeball aux couleurs particulières en mode miniature. Il l'a saisit d'une seule main en tenant l'Evoli de l'autre, la fit grossir et discrètement placer au sol dans l'angle mort derrière le premier pilier de serveur face à lui (après s'être assuré qu'il n'y avait rien) Puis tapota trois bref coup dessus, avant de la laisser telle quel et de continuer son avancée.

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Il se rendit lentement au milieu de la pièce, dans le couloir de rangée le plus large qui menait à un terminal sophistiqué au milieu ; certainement le terminal d'urgence. Puis, alors qu'il s'en approchait, il vit au loin derrière (malgré l'angoissante lumière verte) une fine sacoche avec des dizaines de petits morceaux électronique de formes inégales éparpillées autour. Il fit un pas dans cette direction, et le bruit d'un déclic plus que familier se fit dans son dos ; si familier qu'il n'en fut nullement étonné de l'entendre.


«Et de deux, ce qui nous fait la paire.» Convint une voix derrière lui.

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Par habitude, tel que son mentor le lui avait apprit, il ne se tourna pas de lui-même pour faire face à son adversaire et contenta de faire silence. Cependant il ne leva qu'un seul bras en réponse au fait qu'il reconnaissait bien le danger, car l'autre était occupée ; ce qu'il lui donnait un avantage à plus long terme.


«Y'aurait-il un problème avec l'autre bras ?» Nota-t-la voix sans une pointe d'ironie. «Vérifions ça tout de suite : tournez-vous je vous prie, lentement…»


Obéissant à l'ordre, il se tourna lentement pour faire face à son adversaire qui le tenait en joue avec une arme de poing, caché derrière l'autre agente (visiblement inconsciente) en s'en servant comme bouclier humain. La lumière de vert pâle qui les éclairait depuis le sol ne lui permettait pas de se faire une vision claire de l'agresseur, mais la manière dont sa tenue renvoyait avec un tel éclat cette dernière lui indiquait qu'il ne devait pas porter n'importe quoi, ni être n'importe qui.


«Oh je vois, un passager imprévu.» Constata l'homme visiblement haut gradé, en notant le manteau servant de couffin duquel sortaient deux longues oreilles ; et les bout des deux matraques mal rangées à son pantalon.

«Que voulez-vous.» Reprit-il d'une intonation purement neutre.

«Vous empêcher de mettre la main sur des données, malgré le risque ridiculement faible que vous puissiez y parvenir. Mais surtout savoir qui vous êtes.»

Il montra la pokémontre de l'agente qui pendait par-dessous son arme, sans pour autant que cela ne nuise à sa visée.

«De loin ça ressemble à une pokémontre comme on en voit de partout. C'à en a les caractéristiques physique, le même écran, le même poids, les mêmes boutons aux même endroits, jusqu'au même fond d'écran par défaut lorsqu'on s'en procure une neuve. Mais ses caractéristiques techniques appartiennent à une toute autre dimension.» Statua-il. «Ce n'est clairement pas du matériel appartenant à la Ligue ; tout comme vous n'appartenez sûrement pas à la ligue. Alors je ne poserais la question qu'une fois : qui êtes-vous.»

Voyant qu'il pointait son arme vers la tempe de la jeune femme prise en otage, il comprit qu'ici le seul moyen qu'il avait de l'emporter était de gagner du temps.

«Tout comme vous, une organisation d'ordre purement privée qui suit ses propres buts.» Répondit-il juste à côté.

«Quel genre de but ?» Reprit-t-il d'un ton plus menaçant en raffermissant la prise de son arme.

«Le genre de but qui nous amène à entrer en conflit avec d'autres organisations secrètes ; le genre d'organisation secrète qui n'hésite pas à s'en prendre à des êtres sans défense.» Renvoya-t-il calmement en dévoilant le visage de l'Evoli.

A la vue du pokémon endormi, l'homme lui faisant face sembla un instant relâcher la tension de ses muscles ; pas de soulagement, mais de dépit.

«Donc vous êtes après Rising Sun.»

«Je n'ai pas à devoir être après vôtre organisation pour vouloir vous empêcher de tuer des gens innocents, humains comme Pokémons.» Contra-il immédiatement.

«Dans une guerre il y'a toujours des pertes.» Répondit platement le ravisseur.

A ces mots, malgré la menace constante du compte à rebours, il ne put s'empêcher de rester silencieux quelques secondes.

«Une guerre ?» Finit-il par répéter, partagé entre l'incrédulité et l'irritation. «Avec qui, la Ligue ?»

L'homme lui rendit un rire jaune.

«La Ligue ?» Dans sa bouche le mot sonnait comme une insulte. «Ces incapables n'ont pas été fichus de régler eux-mêmes les problèmes croissants sur leurs propres îles, ni même d'apporter du soutien aux autres quand ils en avaient finalement l'occasion. Tout ce qui fait que la Ligue tient encore est purement et simplement dû au hasard et à une cascade de miracle. Mais cela va bien plus loin que cette forme de contre-plaquée figurative.»

«Au point de devoir sacrifier tout ce qui vous barre la route ?» Reprit-il sur une note de cynisme prononcée. «Enlever des pokémon comme sujet de test pour des expérimentations innommables, les rendre fous ou complètement asservis ; prendre des ouvriers en otages avec des pokémons en guise d'explosifs vivants ; tuer de sang-froid même vos propres hommes sans une once de pitié ou de remords… Dîtes-moi : quelle genre de guerre mérite que vous vous en preniez à Sinnoh et à tous ses habitants ?»


La colère transparaissait clairement dans sa voix, mais il faisait preuve d'une maitrise étonnante pour l'empêcher d'éclater ; que ça soit par son propre self-control ou par le pistolet pointé sur la femme inconsciente. C'est là que l'homme se rendit compte que l'intrus lui faisant face était encore très jeune (n'en étant pas sûr au premier abord à cause de la lumière.) Jeune, donc naïf ; mais aussi prometteur.


«Pas une guerre. Une révolution.» Reprit l'homme sur un ton plus calme. «Vous aurez beau dire ce que vous voudrez. Vous cacher derrière vôtre image et attitude de sauveur et de héros, et avancer être le bouclier du peuple. Mais j'ai pu constater de mes propres yeux l'effroyable gangrène qui ravage jusqu'à l'essence de ces mêmes «valeurs» que vous défendez, et qui ne cesse de se répandre et de croitre de jour en jour.»

«Quelle gangrène ?» Le reprit immédiatement le jeune homme sur cette même colère. «La même gangrène qui vous donne la raison de faire sauter cet endroit, de prendre une femme en otage et de rester ici à nous retenir en risquant vous aussi vôtre vie ?»

«Nous n'avons pas à en arriver là si vous faites l'effort de dépasser vos aprioris ; contrairement à la Ligue, j'ai la décence de reconnaitre que ce que je fais n'est pas tout rose. Quand à vôtre amie, je l'ai juste assommée ; simple mesure de précaution. Alors accordez-moi au moins crédit avant de condamner mes actions sans les avoir même écoutées.»

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Sachant de toute manière qu'il n'avait pas le choix avec l'arme braquée sur elle, l'intrus fit silence pour lui faire comprendre de continuer.

«Vous souvenez-vous de l'attenta commit à Carmin-sur-Mer ?» Commença-t-il simplement.

Le léger choc tétanique qui parcourut l'intrus en guise de réaction lui satisfait amplement.

«Bien, au moins vous avez une très vague idée d'à quel point vous n'imaginez pas l'horreur qui en découle et de ses implications.»

«Parce que le Consortium en serait à l'origine ?» Le devança-t-il neutralement.

L'homme sembla s'être comme arrêté à le regarder de ses yeux ronds, avant de se mettre soudainement à éclater de rire. Mais le jeune homme restait de marbre.

«Je commence à comprendre un peu plus qui vous êtes.» Reprit-il d'un ton enjoué, même amusé. «En fait vous n'en avez pas après Rising Sun, mais après ceux responsable de l'attenta. Même indépendants de la Ligue, je parie que vous ne pouvez sans doute rien faire sans eux pour le moment. Sinon pourquoi avoir conservé à tel point vos visages cachés.» Continua-t-il sur ce même ton.

«Et moi je déduis que vous devez être le plus haut gradé possible de cette base, mais que vous n'avez pourtant pas l'air de beaucoup tenir à la vie en général.» Lui rendit-il toujours neutralement, mais sur une note cassante.

Le Capitaine prit la remarque sans mal, concédant même de la tête le premier point déduit par le jeune homme.

«En même temps, ceux qui ne sont pas près à risquer leurs vies pour affirmer ce en quoi ils croient ne sont que des grandes gueules et des tocards.» Reprit-il durement. «Bien, vous savez que le Consortium est bien –en partie- à l'origine de cet attenta ; il l'a bien financé, je peux vous le garantir personnellement…» Il marqua une courte pause. «Mais que diriez-vous si je vous disais que c'était la Ligue qui a fournit le tueur ?»

«Impossible.» Renvoya-t-il immédiatement sans autre forme de procès.

«C'à c'est que j'appelle une réponse rapide !» Reprit l'homme en riant brièvement. «Je n'ai qu'une question pour défendre ce que j'avance : qu'aviez-vous pensé en premier quand on vous a expliqué que le Consortium était derrière l'attenta ?»


Il fit silence. Cela lui en coûtait de l'admettre mais sur le coup, lors du briefing, quand les maitres ont affirmés ce même point, il n'avait pas réussit à le croire ; jusqu'à ce qu'ils exposent leurs conclusions et les constats à la base de ces théories.


«Précisément.» Reprit-il en réponse à son silence éloquent. «Le monde n'est pas noir, le monde n'est pas blanc : il est gris. Un gris qui ne fait que s'éclaircir ou s'assombrir en fonction de quel côté la balance penche ou non en faveur de ses convictions, et ceux qui prétendent l'inverse sont les bergers qui tiennent à garder le troupeau de Wouattouat dans leur enclos utopique. Jusqu'à ce que l'un d'entre eux ne s'échappe ; un mouton comme les autres qui se rend finalement compte que l'illusion de son confortable petit train de vie ne tiens qu'à l'ignorance et l'égoïsme dans leurs formes les plus viles. A cet instant le berger craint pour son pouvoir et que ses ouailles ne lui échappe. Et que fait le berger pour chercher à conserver les deux sans révéler sa vraie nature ?» Fit-il la note levée à l'intention du jeune homme.

«Il le dépeint comme le Démolosse.» Répondit-il calmement, sous l'approbation du Capitaine. «Il l'avance comme la malédiction qui touche tout ceux qui s'avance hors des limites de son pouvoir, et le terrible châtiment qui les attend s'ils venaient à remettre en cause sa parole et sa protection. Il se sert de cette déviance pour renforcer son influence, en usant l'ignorance pour instiller la crainte et l'égoïsme du confort qu'il génère pour qu'ils acceptent sa vision. Personne ne vient donc à répéter la même erreur de crainte d'avoir tord sans pouvoir en assumer les conséquences, et de toute manière n'y trouver aucune raison qui pourrait le pousser faire ce choix de lui-même, autre que la curiosité.»

«Le principe fondamental du raisonnement de l'ancien ordre Ecclésiastique sous la période impériale.» Reprit-il plus détendu ; peut-être allait-il parvenir à le convaincre. «C'est exactement à ce même modèle de raisonnement que nous sommes revenus depuis ces dernières années, à la seule différence que le contexte technologique et les alliances commerciales inter-archipels ne permet aucun contrôle centralisé. Mais cela n'empêche en rien aux êtres dans l'ombre du pouvoir d'en abuser au détriment du monde pokémon dans son intégralité, et de nuire jusqu'à son futur pour sa simple satisfaction !» Finit-il par se laisser emporter par son propre discours passionné.

«Et vous comptez régler ça par le terrorisme et la torture ?» Répondit-il froidement pour freiner ses ardeurs.

«Que vaut-il mieux : connaitre une effroyable terreur qui dure peu longtemps, ou vivre dans la crainte éternellement ?!» Renvoya-t-il fermement. «J'habitais dans l'extrême Nord de l'archipel Orange avec ma famille lorsque la brève mais terrible tempête liée au réveil des légendaire d'Hoenn a éclatée, et ravagea les trois-quarts de nôtre petite île quand ses échos destructeurs nous touchèrent de plein fouet ; tuant ma femme et mon fils dans l'hécatombe qui en a résulté ! Et où étaient les champions et le maitre de nôtre Ligue à ce moment là ?! Où étaient les secours et les aides normalement mobilisées par le Consortium ?! Les premiers n'ont pas envoyé un seul dresseur, même pas un seul Leveinard ! Et le seul bateau qui accosta lors de cette période sur nôtre île fut un transporteur affilié au Consortium ; uniquement venu dans le but de récupérer le matériel technologique et les recherches de l'Observatoire installé sur la petite montagne de nôtre île, et qui était le seul bâtiment à n'avoir pas souffert de la tempête ! Ils n'ont même pas prit la peine de soigner des blessés, ou même d'en prendre quelque uns à leur bord pour les amener aux services compétents, prétextant qu'ils n'étaient pas équipés pour ; alors que leur transporteur faisait la taille d'un immeuble allongé de vingt étages ! Mais le pire est que le sort de nôtre île n'est même pas passé aux informations !!! Personne n'a strictement rien su de la tragédie qui a emportée un tiers de nôtre petite population, car à la place il y avait la retransmission de l'inauguration d'ouverture du Battle Frontier !!!»


Alors que l'homme laissait le flot grondant et amer de ses pensées se déverser de tout son soûl sur lui, l'agent voyait le temps filer dangereusement sur la pokémontre qui pendait à sa main. En fait, compte-tenu du temps qu'il leur avait fallu pour arriver jusqu'ici, en se basant sur sa propre estimation, il voyait qu'ils n'avaient plus le délai nécessaire pour s'échapper d'ici avant que tout n'explose. Mais il savait qu'il existait un autre moyen pour s'échapper, il en devinait même la nature, mais devait pour cela amener ce pauvre homme désabusé cruellement là où il voulait qu'il soit.


«Donc, pour changer les choses, vous décidez de vous allier avec ceux initialement responsables de la tempête et de faire souffrir toutes les personnes qui ne vous approuvent pas ?» Reprit-il neutralement.

«Je vous croyais suffisamment intelligent pour ne pas vous abaisser à déformer mes propos.» Renvoya l'homme brutalement en pointant à nouveau son arme sur lui. «Ce qui avait poussé les chefs de la team Aqua et Magma à agir dans ces extrêmes et à sous-estimer la puissance des Légendaires était initialement parce que le Consortium n'a pas accorder un seul instant d'attention aux problèmes qu'ils relevèrent sur l'ile : Archie n'était qu'un simple océanologue qui a découvert à quel point la mer devenait de plus en plus inhabitable pour l'écosystème marin, et dont les implications à longs termes allaient de toute manière se répercuter fatalement sur l'écosystème terrestre ; Max n'était quand à lui géologue lorsqu'il constata que la surexploitation non-optimisée des ressources terrestre par l'être humain menait à une dégradation dangereuse et désastreuse des sols, tandis que les nouveaux principes d'exploitation développés surpassaient de bien trop les techniques de recyclage devenant désuètes alors qu'elles ne suivaient pas la cadence. Ces deux énormes avaries auraient pu être réparées avant même de commencer à atteindre le stade d'inquiétude qui précédait le stade de peur, auquel finalement on se décide à porter attention alors qu'il est presque trop tard. Mais qu'à fait le Consortium ? Strictement rien du tout ; préférant investir les quelques milliards qui auraient pu éviter cette catastrophe dans la construction du Battle Frontier de l'île de combat pokémon !»

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Ce qui était le plus déplorable dans toute cette histoire, c'est que c'était vrai. La construction du Battle Frontier fut approuvée quelques années avant la venue des Teams Aqua et Magma, mais fut achevée à peine quelques semaines après les évènements marquant d'Hoenn ; l'île artificielle avait été aussi touchée par la catastrophe naturelle dû au réveil des légendaire et fit perdre l'équivalent d'une année entière de travail en termes de dommages matériels. Rien que pour relancer le projet cela devait coûter des centaines de millions, et le Consortium en a injecté des milliards supplémentaires pour qu'elle se termine dans les temps. Une grosse controverse a éclatée à ce sujet ; gageant que l'argent dépensé aurait pu être mieux utilisé dans l'aide et la réparation des dégâts liés à la violente tempête «à l'origine inexplicable», plutôt que de le mettre si frénétiquement en œuvre pour donner aux dresseurs de tout horizons un nouvel endroit où se «défouler». La branche d'Hoenn du Consortium avança que c'était la preuve de la volonté de l'île à ne pas se laisser abattre et à se relever courageusement contre l'adversité ; prétextant de toute manière que la Ligue et ses champions s'occupaient parfaitement bien de leur tâche, dans le rôle d'icônes de l'ile et dans l'aide humanitaire, et qu'en ce sens il ne servait à rien de déblatérer inutilement et de leur faire confiance pour que les choses s'arrange.

Quelques voix s'élevèrent tout de même, mais se turent toute quand l'achèvement de la construction du Battle Frontier fut annoncé et son ouverture officialisée. Et surtout quand des dresseurs du monde entier venait pour y manifester aussi bien leur soutien que leur désir de combattre ; la première rente de la journée ayant atteint un score qui resterait encore longtemps dans les annales, et qui commençait à renflouer petit à petit le coût initial. Source du débat houleux.

De surcroit ce jour là, un invité de marque était présent pour participer (involontairement) à l'acceptation générale du Battle Frontier, en terme de nécessité, certes exagérée, mais productive ; et ce sans que personne ne puisse hausser la voix. Le dresseur qui était venu au bout des champions tout en affrontant les teams, pour finir par défaire le conseil 4 et le maitre de l'île dans la foulée, devenant ainsi l'héritier du titre de maitre : Brice Régalia.

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«Je peux comprendre ce que ça fait.»


La déclaration de son jeune interlocuteur prit l'homme par défaut, étonné par le calme qu'il conservait malgré l'arme pointé sur dans sa direction et lui qui était pourtant rendu fébrile par l'emportement dont il avait fait preuve. Mais dont les mots qu'il prononça le firent se reprendre lentement.


«Je peux comprendre ce ça fait de perdre ses proches, que d'assister impuissant au spectacle de leurs morts sous ses yeux. De sentir la douleur du vide qui s'empare de soi, de s'être fait déposséder de tout ce qu'on a ; jusqu'à l'envie de vivre. Cette impression horrible de manque qu'on ne peut jamais arriver à accepter et qui ne se comblera jamais même après des années. Puis le sentiment de rage et d'injustice qui cherche à le combler en nous plongeant dans la vengeance, ne devenant alors tout ce qu'il nous reste comme raison de vivre ; jusqu'à suivre la voie du massacre pour espérer obtenir justice...»


Le Capitaine Yooku Dhalm, de son vrai nom Eric Moltan, commença lentement à baisser son arme au même rythme que sa tension. Les sentiments qu'il décrivait, combien de fois les avait-il ressentit strictement dans le même ordre alors qu'il se remémorait son passé douloureux à chaque fois qu'il sortait sa bouteille d'alcool en prévision pour aider à oublier ? Il n'avait jamais fait les comptes, car l'idée ne lui avait jamais traversé l'esprit. Peu importait qu'il pensa à sa femme et à son fils des centaines de milliers de fois, l'intensité de son chagrin restait la même que le jour où il les avait perdu. Il n'y avait vraiment qu'une personne qui avait autant perdu que lui qui pouvait comprendre son tourment et son désir d'obtenir justice, peu importait les moyens à mettre en œuvre pour y arriver. Le fait que la personne en face de lui joue exactement sur le même terrain, lui faisait se sentir un peu moins seul, moins isolé dans son malheur, et venir renforcer sa conviction qu'il était sur la bonne voie ; malgré sa nature terrible.


«Mais ça ne justifie rien.» Reprit-il d'un ton clair et posé.

Ces simples mots furent suffisant à l'homme pour perdre son souffle l'espace d'un instant, et de fixer droit dans les yeux du jeune homme.

«Faire étalage de la terreur et de la violence dans une vengeance aveugle ne mène à rien d'autre que la haine et la peine. Vouloir faire payer les responsables de son malheur en s'en prenant à d'autres n'y étant pour rien n'est qu'un acte de pure barbarie. Et justifier ces actes et les morts qui en découle au nom de sa propre conception de la justice ne fais que vous rabaisser au même niveau que ceux que vous haïssez ; souillant l'âme et la mémoire de ceux pour qui et quoi vous vous battez en répondant à l'appel de la vengeance. Ce n'est pas une justice, c'est une vendetta personnelle.»


Un lourd silence pesa alors que le Capitaine accusait la déclaration de l'homme lui faisant face. Le choc était dur, intense, terrible au point qu'il pouvait sentir son sang bouillir et entendre les échos de son grondement de toutes les parties de son corps. Il avait été naïf de croire qu'il pouvait réellement comprendre ce qu'il pouvait ressentir, et lui faire saisir la nécessité de cette guerre et des moyens à mettre en œuvre pour la remporter ; peu importait le coût !


«Pauvre idéaliste ; le monde n'est pas un endroit dans lequel l'amour et la générosité existe sans contrepartie douloureuse !» Reprit-il en re-pointant vivement son arme sur lui. «Je vous croyais sincère dans vos paroles et suffisamment intelligent pour admettre la cruelle réalité du système, et de vous battre contre lui pour changer les choses ; je fut naïf de penser que vous pourriez réellement savoir ce que je ressentais et me balancer autre chose qu'un crack de pro-pacifiste d'opérette.» Lâcha-t-il honnêtement déçu.

«Ce ne sont pas des cracks, c'est le constat de ce à quoi vous amène vôtre conviction et le résultat que vous allez en tirer.» Contra-t-il toujours calmement. «Vous prétendez faire ce que vous faites aussi bien pour le monde qu'en la mémoire de vôtre femme et de vôtre fils, mais que penseraient-ils s'ils étaient toujours vivants et vous voyaient perpétrer toutes ces horreurs en leurs noms ? S'ils étaient présents dans cette pièce et vous voyaient menacer quelqu'un d'une arme et d'une explosion ?»

«LA FERME !» Explosa-t-il en n'étant à deux doigts d'appuyer sur la gâchette. «Ils sont morts sans avoir eut le choix, et n'auront plus jamais l'occasion de voir le Zénith d'azur sur le flanc sud du mont Terracotta ! Je n'ai même pas eut le droit de les enterrer au cimetière de la falaise du reflet pour qu'ils puissent pour toujours au moins voir le coucher de soleil au crépuscule orange, parce que les aides finalement arrivées étaient plus occupées à récupérer les cercueils de ceux qui étaient déjà morts que de ceux qui venaient de mourir ; m'obligeant à les enterrer dans la parcelle de terrain ravagée qui fut autrefois nôtre maison ! Qu'est-ce que vous pouvez savoir de ce que je ressens, ou que ma famille pourrait ressentir !!!»


Il était dans une colère terrible, la main tenant son pistolet rendue tremblante par sa rage arrivée au point critique d'éclater. De la seule chose qui le retenait de laisser libre court à sa haine était le calme toujours olympien que conservait le jeune homme, et son regard d'un ambre indéfinissable sur lequel s'écrasait sa colère comme les vagues sur un récif. Imperturbable.


«Contrairement à vous qui avez perdu ce que vous aimiez le plus au monde devant vos yeux, impuissant à empêcher leurs morts, sans que ça soit de vôtre faute… La personne que j'aimais le plus au monde est morte de mes mains.»


Ses tremblements cessèrent immédiatement. Son regard, ce calme, cette imperturbabilité constante… Un silence plus incroyable que celui de l'isolation se fit alors que le Capitaine comprenait que l'homme qu'il tenait en joue ne mentait pas, et que son absence de peur totale à la possibilité de mourir trouvait sa raison : ayant perdu de ses propres mains ce à quoi il tenait le plus au monde, il avait expérimenté une douleur au moins équivalente, si ce n'est pire que la sienne.


«Alors pourquoi se battre pour un monde qui ne le mérite pas ?» Reprit-il incompris, hésitant à saisir la contradiction se cachant derrière ses actions –malgré la fin proche du compte à rebours. «Pourquoi suivre comme un brave toutou les même règles édictés par ceux qui les bafouent et qui nous font souffrir ? Pourquoi se soumettre à l'illusion de leurs mensonges sans se révolter contre l'infamie qui en découle ? Pourquoi accepter de défendre et de vivre dans ce système décadent et corrompu jusqu'à l'os, et de martyriser et de marginaliser les efforts de ceux qui se rebellent pour obtenir la seule vraie liberté ; sachant que d'un cas comme dans l'autre cela ne se paiera qu'au prix du sang et des larmes ?»

«Parce que la corruption du système découle de la haine et de la peur.» Répondit-il simplement. «L'état du système ne reflète que ceux qui le compose et l'ont crée : les humains. Une rébellion menée dans le sang et la violence n'apporte que la même haine et la même peur qu'elle tente d'éradiquer sans savoir, reflétant la corruption sous sa forme la plus horrible et la plus brutale, et confortant l'origine du cancer dans sa position vu que le désir de rébellion adopte ses mêmes méthodes. Que la rébellion ou que le cancer l'emporte, le cycle de haine et de peur se maintiendra éternellement. Et rien ne changera jamais.»

«Et pourtant sans révolution il n'y a aucun progrès.» Renvoya l'homme en campant fermement sur ses positions. «Sans la révolution ayant amenée la chute de l'Empire et de l'église, les îles seraient encore le théâtre de luttes internes fratricides entre familles nobles rivales, et les massacres en chaine perpétrés par l'Ecclesiarchie sous le règne de l'obscurantisme resteraient aussi impunis que monnaie courante ; comme la déchéance de l'île de Tanith et l'extermination pure et simple de sa population, par la croisade noire de l'armée impériale menée au nom de l'église ! Vous allez me sortir que la rébellion de Sebastian Thor n'a mené à rien, et que la fin de cette période de guerre sanglante n'était pas justifiable ?!»

«Et vous justifiez vos actes de terrorisme et de torture de vôtre rébellion en les comparant à ceux de l'âge de l'Apostasie ?» Il soupira lourdement. «Je n'ai pas l'énergie ou le temps de vous faire remarquer à quel point vôtre extrémisme radical vous pousse à comparer l'incomparable pour justifier l'injustifiable.»

«Et je suis las d'entendre les arguments de cette logique irréaliste et dépassée.» Lui renvoya-t-il à bout.

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La discussion arrivant à son terme, le Capitaine se saisit de la manche du bras armé de sa tenue (sans pour autant relâcher sa prise sur son otage) et la releva pour découvrir une forme de large gantelet sur lequel se trouvaient trois pokéballs en taille réduite. Il se saisit de celle du milieu le plus calment du monde pour la faire grossir, alors que le décompte à la montre arrivait en dessous d'une minute.


«J'espérais vraiment que vous compreniez la nécessité que l'on incarne pour l'avenir du monde pokémon et de vous convaincre de nous rejoindre.» Il soupira de dépit sans pour autant relâcher son attention sur le jeune homme. «Quel gâchis.» Conclut-il.

«En effet, quel gâchis.» Le reprit-il plus calme encore que le silence. «Merlin, vas-y.»


Sans avoir même le temps d'appuyer sur le bouton de sa pokéball, ou même d'y penser, une forme silencieuse sortit depuis les ombres pour empoigner la main tenant l'arme braquée et en écarta la mire pointée vers le jeune homme, avant de forcer le ravisseur à lâcher le pistolet d'une torsion légère du poignet en appuyant sur un nerf.

Il ne put d'avantage réagir alors que la silhouette ne s'arrêta pas là, et donner deux légers coups à l'arrière de ses deux genoux pour le forcer à plier, et lâcher son otage et sa ball, alors qu'il perdait son équilibre. Puis, continuant dans la manœuvre, la silhouette profita de la chute et la baisse de taille de sa victime pour empoigner sa tête, tout en ramenant son autre bras derrière dans une nouvelle torsion, ce qui le contraignait à plier brutalement à l'avant.

Sans n'avoir rien comprit, le ravisseur s'était fait maitriser en l'espace d'un battement de cils.

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Il n'arrivait pas à la croire ; comment n'avait-il rien vu venir ? Il avait vérifié sur la femme qu'elle n'avait aucune autre pokéball que celle des deux souris qui s'étaient enfuit sur son ordre, et avait silencieusement surveillé depuis les ombres l'autre intrus depuis qu'il était entré et n'avait noté aucune tierce présence ! «Merlin», ça a tout du surnom qu'on donne à un pokémon ; mais il n'avait vu aucune ball à la ceinture de son interlocuteur ! Et même s'il en avait effectivement une, vu qu'il est absolument sûr de n'avoir vu personne d'autre que lui pénétrer dans la pièce : comment aurait-il pu sortir de sa ball sans qu'il ne note invariablement le flash de lumière allant avec ?! C'est insensé !

Mais alors qu'il se posait ces questions, son adversaire (qui désormais le toisait de haut, mais sans aucune forme de dédain) s'approcha lentement de son ex-agresseur pour venir ramasser la montre et la ball qu'il tenait encore dans sa main il n'y avait même pas quelques secondes, et en faire sortir son occupant ; deux yeux comme vide par-dessus la moustache tombante de son nez, sans sa cuillère avec une sorte de curieux bracelet, et dont le manque d'énergie flagrant montrait à quel point il souffrait : un pauvre Kadabra qui semblait en avoir de bien plus belles à une époque fort reculée.

Sans plus attendre, alors que le pokémon notait tout juste que son «maitre» était dans une position peu enviable, le jeune humain qui tenait un semblable torturé avec grand soin s'adressa à lui sur un ton concis, mais contenant une forme de déférence qu'il n'avait plus perçue depuis des éons.


«Téléporte-nous dans un endroit sûr, loin d'ici et de ceux qui te retiennent comme lui.» Lui demanda-t-il calmement.

L'homme ne put s'empêcher de rire devant une telle ineptie.

«C'est un pokémon conditionné uniquement pour m'o-»


Il s'interrompit avec stupéfaction alors qu'il voyait (tant bien que mal dans sa position) le Kadabra verser comme des larmes de soulagement, avant de commencer à briller de plus en plus intensément ; la lumière les englobant tous comme une myriade de petites lucioles intangibles, alors que le compte à rebours arrivait sur zéro.


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Sinnoh. Partie Sud de la chaine de montagne Couronnée. Base Echo 1 de Rising Sun. A plusieurs dizaines de mètres de l'entrée du hangar principal.

Jeudi 22 Avril, 21 heures 21 minutes.



D'abord le grondement, sourd et bruyant. Puis les cris, nombreux et fuyant. Suivit de la lumière, détonante et trébuchante. Enfin de l'explosion, intense et fracassante…

Les couloirs taillés dans la roche s'effondrèrent alors que l'air embrasé tentait de s'échapper de ce piège labyrinthique en suivant l'appel d'air de la sortie. La pression terrible mise en œuvre lorsqu'un obstacle bloquait la route de la colonne de feu emportait indifféremment matériel électronique, roche, ou métal considérés comme parmi les plus résistants, pour les pulvériser et les calciner comme s'ils ne s'agissaient que de verre et de papier.

Enfin, quand l'incroyable choc parvint à la sortie pour atteindre sa masse critique, le feu rageur s'engouffra dans la brèche ouverte comme un démon de l'enfer fracassant la porte des limbes dans une détonation à l'écho dantesque qui illumina les alentours comme en plein jour.

Des débris de fer et de roches en flamme s'élevèrent dans le ciel pour retomber sur terre dans une promesse de mort pour tous ceux ayant le malheur de se trouver sur leur funeste route, faisant hurler de terreur les pauvres fous ayant eut autant la naïveté que l'audace de regarder avec fascination et horreur le spectacle qui se déroulait sous leurs yeux, au lieu de continuer à fuir et espérer se mettre à l'abri juste à temps pour éviter cette fureur aveugle. Mais heureusement, les champions veillaient à ce que la mort ne soit pas de la partie cette nuit là.

Dans tout autant d'étoile composant une grande constellation, répartit aussi efficacement que possible les uns des autres, toutes espèces confondues, les pokémons de l'élite prirent position et firent appel à tous leurs pouvoirs pour générer la plus impressionnante défense qu'il ait été donné de voir depuis des siècles : les Sols de l'honorable conseil 4 creusaient autant d'abri dans la terre boueuse qu'il n'y avait de personnes, tandis que les Plantes de la championne sylvestre les recouvraient tout autant de ronces et de lianes les plus solides qu'ils puissent sortir ; l'élite de l'eau et de la foudre firent appel au marais alentours pour leur prêter sa force et son essence dans un tourbillon de Siphon monstrueux qui engloba la totalité du périmètre de repli dans une forme de dôme élémentaire imposant ; tandis que les Psys du pilier du conseil canalisaient leurs puissances à rendre l'eau la plus dense possible, tout en se servant des propriétés améliorées de la foudre pour générer un champ de répulsion à l'égard de tout projectile métallique.

La majorité d'entre eux furent arrêtés par l'impressionnante défense des champions. Mais certains débris, aussi gros que des Ronflex, parvinrent à passer outre la barrière pour menacer de s'écraser en plein dans les lignes humaines et pokémons pour en prélever leur tribu. C'est là qu'intervinrent la dernière ligne de défense du bouclier, en la présence d'équipe du Kamikaze et de l'Héritier : aussi rapide que le vent et puissant que la tempête, les douze frères et sœurs de combat se ruèrent à plein entrain sur les rochers en hurlant leur défi ; les réduisant férocement à l'état de simples cailloux, alors que les projections de gravats ne purent encaisser le déchainement furieux de coup additionné à la force initialement mise en œuvre pour les projeter.

Enfin le dernier débris à passer, pour semblait-il conclure en apothéose, faisait trois fois la taille des plus gros ; une véritable comète par rapport à tous les autres. Concertant toute leurs forces dans un coup synchronisé décoché dans un hurlement de défi unique, la puissance fournit par l'alliance des types rencontra le roc dans une détonation pouvant prétendre à rivaliser avec celle de l'explosion, avant de le pulvériser dans l'instant suivant ; le réduisant à l'état de poussière.

L'explosion était finit, et ses conséquences dangereuses furent maitrisées sans relever aucune perte dans aucun camp, qui pour le coup n'en formèrent qu'un.

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Malgré leur nombre très nettement supérieur, quand les sbires se rendirent compte que «leurs» pokémons étaient à nouveau libres et animés d'un terrible désir de vengeance, ils se rendirent sans condition ; n'ayant plus aucune résistance digne de ce nom à offrir. Que ça soit en termes de force ou de la volonté d'une dernière action d'éclat. Les dresseurs dépensèrent même la majorité de leur énergie plus à empêcher que les pokémons ne s'en prennent à leurs anciens «maitres» qu'à surveiller les sbires. Jusqu'à ce qu'ils récupèrent toutes leurs pokéballs et ne rappelèrent chaque pokémon y étant associé, en attendant l'arrivée des forces de police pour s'occuper de tout ce beau monde et le retour à la ville.

La bataille avait prit fin.

Mais il manquait un détail pour que la pièce soit parfaite. Une ombre subsistant sur le tableau qui contribuait à l'empêcher d'être achevé et pouvoir enfin l'admirer, tant que la dernière touche n'était pas finalisée.

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Après que la championne ait donnée ses directives à ses pokémons concernant le périmètre de sécurité à conserver avec leurs prisonniers, elle se dirigea vers le chef scientifique avec qui elle avait fait équipe aussi rapidement que l'inconsistance du marais le lui permettait. Et surtout pour éviter de faire tomber les deux petits passagers inattendus rencontrés durant leur fuite, qui s'étaient logés sur chacune de ses épaules ; et qui n'avait cessés de regarder en direction de l'endroit de l'explosion depuis son début jusqu'à maintenant.

Arrivée à son niveau, elle vit que ce dernier l'attendait l'air fatigué, les traits du visage tirés au point de lui donner vingt ans de plus, alors qu'il discutait à part des membres de son équipe avec quelqu'un en communication sur la pokémontre qu'il tenait à bout de main.


«… La police a réquisitionnée le reste des aéroglisseurs de l'arène et à aussi mobilisé le Wailisseur pour l'occasion. Les renforts de la ville seront là très bientôt.» Répondit la voix posée qui venait de la pokémontre, en réponse à une question de son interlocuteur.

«Nate, Directrice…» Interpella-t-elle par les politesse d'usage en entrant dans la conversation. «Des nouvelles d'eux ?»


Un lourd silence se fit avant que la directrice ne réponde, tandis que le scientifique notait l'expression désespérée des deux pokémons sur ses épaules qui accrochaient fermement leurs regards sur la montre comme la dernière chose qu'il leur restait ; se souvenant à quelle personne ils desservaient ce traitement, et qui était l'une des deux non présente à leurs côtés.


«Nous avons tentés d'établir la communication avec eux, mais nous ne recevons aucun signal de leur pokémontre.» Déclara-t-elle platement. «Cela pourrait très bien être dû à des interférences causées par l'explosion. Mais je n'affirme rien…» Elle marqua une pause. «Et de vôtre côté ?»

«Six aéroglisseurs qui y sont restés à cause de la panique, trois autres endommagés des suites du chaos et de la débandade générale ; des dizaines de blessés, humains et pokémons, aussi bien chez nous que chez les sbires. Mais on est encore en train de faire le compte ; ça a été un vrai chaos pour faire sortir tout le monde.» Répondit-il d'un air las.

«Y'a-t-il un espoir pour qu'ils puissent s'en être sortis ?» Avança une autre voix plus timide depuis la montre.


La question critique de l'autre côté pour la Ligue, à laquelle ils ne voulaient pas franchement répondre. Mais ne serait-ce que par respect pour l'aide apportée (ou la vue des deux souris dans un état lamentable), ils se devaient de leur répondre honnêtement.


«Comme je l'ai dis, ça été un véritable chaos dans tous les sens du terme. Au milieu d'un tel foutoir, il était impossible d'affirmer avec certitude les avoir vu sortir ou non ; ils pourraient très bien avoir empruntés une même voie de secours que les Admins lorsqu'ils abandonnèrent leurs troupes.» Répondit-il en se voulant le plus optimiste possible ; mais soupirant en constatant qu'il n'arrivait pas à se convaincre lui-même. «Cependant, on était les derniers à sortir de la base quand tout le monde finissait d'évacuer par la porte principale… Et on n'a vu personne d'autre sortir par là après nous…»


Un silence plus lourd et dense que les autres se fit, seulement brisé par le gémissement plaintif des deux pokémons sur les épaules de la championne ; que personne n'osa interrompre. Il était impossible d'être sûr à 100%, ce qui laissait toujours un espoir. Mais un espoir si faible qu'il fut plus que suffisant pour les faire s'effondrer en larme.


«Je… je vais retourner vers mon équipe pour contribuer aux préparations de retour, et atteler les transports encore en état de marche pour qu'ils soient alloués aux blessés.» Finit par déclarer le scientifique en tendant la montre à la championne.


Sachant qu'elle ne pouvait pas laisser les deux pokémons accablés sur ses épaules à leur propre sort, et qu'ils étaient liés d'une certaine façon à cet objet, la championne accepta en silence la montre tendue par le scientifique... Mais c'est alors qu'une seconde petite lumière s'activa sur son côté via un très faible bruit, et que l'incroyable se fit.


«Vous pourriez pas nous en garder un de côté, si c'est pas trop abusé ?»

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Le scientifique lâcha la montre sous le coup de la surprise, mais heureusement immédiatement rattrapée par la championne ; alors que de l'autre côté de la pokémontre, le choc était tout aussi intense parmi l'équipe de communication.


«Nathaniel, c'est bien toi ?!» S'exclama immédiatement une voix masculine au travers de la pokémontre.

«Aux dernières nouvelles, si on s'est pas gourés dans les noms de code, oui.» Répondit-il sur une faible note d'humour. «Par contre ça serait sympa si vous pouviez me dire où je suis, parce que j'ai un peu composé au fur et à mesure pour éviter de finir en puzzle façon particule. Et là je suis dans un coin de cambrousse je sais pas où à Pétaouchnoc.»

Pendant que le duo des renseignements s'afférait frénétiquement à la tâche, la directrice le reprit immédiatement pour le sommer à continuer le rapport.


«Et Shonai ?» Demandait-elle sur un ton ressemblant plus au besoin de savoir que de sa nécessité.

«Elle va bien ; même suffisamment bien pour être en train de se faire une sieste.» Répondit-il calmement.

«J'en connais deux qui sont ravis de l'apprendre.» Reprit la championne alors que les deux pokémons continuaient de pleurer de tout leur saoul sur ses épaules ; mais de bonheur.

«C'à y'est, on les a localisé !» S'exclama la voix féminine du duo de communication. «Vous êtes… Sur la route 212A, à trois kilomètres à l'Ouest du manoir décorum ?!» S'exclama-t-elle de nouveau ahurie. «Mais comment vous avez fait pour atterrir là ?!»

«Je me suis fié à une rencontre fortuite pour nous mener en sûreté.» Répondit-il à nouveau calmement, avant de reprendre plus blasé. «Putain, trois kilomètres à l'Ouest de la route 212 ? C'est pas à la porte à côté… Surtout que je suis pas en position pour bouger tout de suite.»

«Pourquoi vous ne répondiez pas jusqu'à présent.» Demandait la directrice d'un ton cassant.

«Les joies et les aléas du téléport au pif qui vous fait chercher vôtre montre quand vous la laissez tomber bêtement par terre ; et avec que la Lune masquée par des nuages comme source de lumière pour vous éclairer, pas évident de s'y retrouver si en plus elle tombe du côté écran.» Répondit-il entre le blasé et l'amusé.

«Quelle est vôtre situation ?» Reprit fermement la directrice.

«Dans l'ensemble, physiquement pour nous deux, ça peut aller ; à part une belle bosse qui attend la belle à son réveil.» Répondit-il d'une brève tentative pour rassurer les pokémons. «Par contre j'en suis pas aussi sûr avec les autres, et je requiert vraiment un transport pour nous rapatrier.»

Un bref silence se fit à cette dernière remarque, que la directrice s'empressa à nouveau de briser.

«Les autres ? Nathaniel, qu'elle est vraiment vôtre situation.» Exigea-t-elle.

L'agent prit une petite inspiration avant de répondre.

«Shonai qui est juste assommée, mais pour l'instant incapable de bouger…» Rien qu'à ses mots la directrice voyait sa mâchoire se crisper, là où celle des deux pokémons semblait pendre au contraire. «Un Evoli endormi et enroulé dans mon manteau que je teins à bout de bras, moi qui me les gèles, le Kadabra qui nous a sortis de cette mélasse…»

Il marqua une pause alors qu'il les laissait prendre en considération ces informations.

«… Et l'ex propriétaire du Kadabra, qui est au passage le big boss de Rising Sun sur Sinnoh.»


Là par contre le silence fut poignant. Le scientifique et la championne se regardèrent automatiquement dans les yeux, ahuris, là où –même s'il ne les voyait pas- ses collègues étaient littéralement stupéfaits ; en commençant par la directrice, qui n'arrivait pas à croire ce qu'elle venait d'entendre.


«C'est suffisant pour justifier un Taxi selon vous ? De la part d'Unionpolis vu là où on se trouve.» Confortait-il.

«J'appelle tout de suite Kiméra pour lui relayer la demande.» Avança la championne, bien que toujours sous le choc de la révélation.

«Cool.» Renvoya-t-il simplement satisfait. «Au fait, directrice, au cas où vous m'ordonniez que je reste sur ma position en attendant les renforts, ne vous inquiétez pas : je ne bouge pas.»

«Très bien.» Répondit-elle sur un soupir, lui concédant le point pour ce soir.

«Ah ! Avant que j'oublie.» Reprit-il au dépit de cette dernière. «Si c'était possible aussi d'avoir un pull ou un autre survêtement en même temps ; ça caille par ici !»


La remarque reçu une appréhension positive de la part de ses collègue tout autant que les deux membres de la Ligue, jusqu'à la directrice qui s'autorisa un sourire. Mais qui pourtant n'allait pas lui rendre ce plaisir.


«Ne poussez pas vôtre chance trop loin ; je crois que vous avez épuisé suffisamment de stock pour les trois prochaines semaines.» Renvoya-t-elle concise, mais plus détendue. «Et c'est un ordre. Alors ne vous plaigniez pas.» Termina-t-elle selon son ton habituel.

«Aye aye ma'am.» Répondit-il sur l'air du brave soldat qui obéit, avant de retomber dans son attitude désinvolte habituelle. «Je vous avais bien dit qu'il ne fallait pas compter sur moi pour prendre le sermon depuis un cercueil. Nathaniel terminé.»

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Au Nord, à plusieurs dizaines de kilomètres de là, en amont d'une petite rivière composant le circuit fluviale desservant du Mont Couronné vers les marais de la route 212, la communication de l'autre partie se coupait alors que l'homme se tournait vers le Capitaine, maintenu à terre dans une position moyennement confortable ; les pieds et les mains ligotés par des menottes des liens en plastique.


«M'avoir arrêté ne changera rien.» Avança-t-il d'un ton vengeur. «Vous n'imaginez pas combien nous sommes nombreux ; je ne suis qu'un seul au milieu de cette révolution.»

«Mais toujours pas assez.» Renvoya-t-il, avant de reprendre calmement. «Comme dirait mon mentor : à défaut de ne pas encore avoir tes menottes en fer, ne sors jamais sans menottes en plastique ; moins esthétique, mais plus efficace.» Avança-t-il sans une pointe d'humour malgré la remarque.

Puis il tourna son attention vers son compagnon, toujours à surveiller le prisonnier en s'étant assis sur lui, et ne put s'empêcher de soupirer.

«Dire que je ne comptais vraiment pas faire appel à toi de sitôt. M'enfin, merci pour ton aide, Merlin ; ça fait toujours plaisir de te voir à l'œuvre.» Il se tourna ensuite vers le Kadabra. «Et merci pour m'avoir fait confiance et nous sortir de là.»


Le premier répondit par un fin sourire amical, ce qui, avec sa posture assise en tailleur sur l'homme prisonnier, avait quelque chose de presque élégant ; tandis que le second, mentalement épuisé et assit dans son coin, prit le remerciement sans aucune emphase alors qu'il regardait son poignet dénué de bracelet. Des larmes continuaient de couler de ses yeux alors qu'il n'arrivait pas à croire qu'il était enfin sortit de ce cauchemar.

Il y'avait une autre personne présente qui n'arrivait pas à croire ce qu'il voyait, et qui voulait obtenir réponse devant le ridicule enchainement miraculeux s'étant produit en faveur de ce môme.


«Comment…» Commença-t-il sur un ton entre l'incompréhension et l'amertume, n'arrivant pas à choisir par quoi commencer dans tout ce bazar. «Comment se fait-il que tu possèdes un Lucario et que je n'ai absolument pas pu détecter sa présence…»


Le jeune homme détourna son regard du Kadabra pour revenir vers le Capitaine et son partenaire ; dont la rareté de son espèce était la raison principale pour laquelle il n'essayait de le sortir que le plus rarement possible. Pour toute réponse, il ouvrit la boucle de sa ceinture, alors que son Lucario lui rendait sa pokéball, devant ses yeux stupéfaits.


«Quand on avance à l'aveuglette en terrain ennemi, il faut toujours s'assurer d'avoir un joker prêt à intervenir au cas où en toute situation. Mais avant toute chose, il faut s'assurer que l'adversaire ne le voit pas venir.» Déclarait-il en montrant l'hyper ball entourée d'une capsule ball personnalisée. «En temps normal, ces capsules de concours émettent une vive lumière lors de la sortie du pokémon pour impressionner la galerie. Mais en la personnalisant avec les artifices les plus opaques qui soient, on peut obtenir à l'inverse un véritable écran qui empêche toute lumière de s'expulser de la ball et permettre au pokémon de sortir en toute discrétion.»

«Mais tu avais les mains trop occupées pour te saisir d'une pokéball, ce que j'aurais vu d'ailleurs : comment a-t-il pu sortir sans que je le vois ?! Je te suivais depuis les ombres sans te quitter des yeux un seul instant !» Renvoya-t-il méprisant.

«Certains pokémons restent suffisamment conscients de leur environnement dans une ball pour en sortir à volonté ; Merlin en fait partie. Ensuite j'ai simplement profité du moment où j'entrais, et qu'un éventuel agresseur devait se douter que je ne pouvais rien suspecter à peine quelques instants après mon entrée, pour déposer sa pokéball furtivement sans que personne ne puisse noter de loin le changement.»Répondit-il calmement.


L'homme écarquilla les yeux à son explication ; il ne l'avait vu s'arrêter et légèrement se baisser que l'espace d'une seconde, à moins de trois mètres de lui. Personne ne peut être aussi furtif et silencieux ! En tout cas pas un humain ! Mais il accepta cette justification, malgré son aspect abracadabrant, pour enchainer avec un autre mystère qui confinait à la voyance.


«Mais comment as-tu su pour mon Kadabra ? Comment as-tu deviné à l'avance quel était mon plan et tout préparer à ce point pour te permettre de fuir, en utilisant mon pokémon ?!»

«Je suis surprit d'entendre la question.» Lui renvoya-t-il neutralement alors qu'il caressait la tête de l'Evoli qui s'était réveillé entre temps par le Téléport. «Il est évident que toute personne assez folle pour rester en arrière dans un endroit sur le point d'exploser est soit suicidaire, soit accompagné d'un pokémon psy connaissant Téléport. Et vu que ta tenue tranchait totalement avec celle de tous les autres sbires qu'on a croisé, y comprit les Admins, et que je me doutais que de toute manière il y avait de grande chance pour que la majorité des données sur les serveurs avaient été effacées, jamais tu n'aurais été assez fou pour sacrifier ta vie aussi bêtement simplement pour nous empêcher de récupérer des morceaux de serveur probablement vides.»


Il était scié : était-il si prévisible que ça ? Etait-il négligeant à ce point ?! Mais un dernier détail lui restait furieusement en travers de la gorge ; un détail qu'il savait qu'il ne pourrait jamais accepté pleinement tant cela relevait purement et simplement de la magie.


«Et mon Kadabra : comment savais-tu qu'il allait t'obéir, alors qu'il est censé être conditionné pour n'obéir qu'à moi, à moi et à moi seul !?»

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A cette exclamation, le pokémon en question sortit de son état proscrit pour revenir vers le prisonnier ; d'une démarche lente et fatiguée, mais inexorable. Ce dernier nota la venue de son pokémon sans plus d'appréhension que ça, mais fut vite frappé de terreur en voyant le regard foudroyant que lui jetait le pokémon en le toisant ; ses yeux coulaient abondamment de larme suite à l'enfer qu'il lui avait fait vivre, et une rage d'une ampleur incalculable grondait derrière ses pupilles qui le fixaient intensément, animée du désir absolu de le foudroyer sur place dans l'instant.

Il n'y avait aucun mot, humain ou pokémon, qui pouvait lui permettre d'exprimer la terrible rage qui le rongeait du plus profond de ses entrailles ; le brûlant et le consumant de l'intérieur par une soif de vengeance inextinguible. Il n'y avait vraiment aucun son, même parmi les plus primaux, qui pouvait ne serait-ce que lui permettre de relâcher un bref instant la pression… Mieux que de le faire par les gestes.

Le Kadabra leva devant lui la patte qui portait encore la marque du bracelet, là où son système d'endoctrinement de drogue neuronal pénétrait sa chair et son organisme, pour le maintenir à l'état de marionnette dans son propre corps. Elle fut alors parcourue de fin crépitement d'énergie alors que le pokémon, pourtant à bout de souffle, rassemblait de force la moindre parcelle de réserve qui lui restait encore pour matérialiser une forme de lame croissante au bout de son bras.

Il s'avança au niveau de son tourmenteur, le tourmenteur de tellement d'autres êtres vivant ; y comprit –il le sentait- celui de l'Evoli derrière lui. La rancœur le prenait à la gorge comme un étau de la densité du Mont Couronné, alors que l'homme tremblait de terreur devant la manifestation pure et physique de toute la rage qui l'habitait ; ne pouvant deviner que trop bien comment il allait la laisser se déchainer.

Lentement, plus par fatigue et ankylose que par la satisfaction de savourer cet instant, le Kadabra leva tendu le bras armé de sa lame au dessus de sa tête ; accumulant l'élan avant de décocher la Coupe Psycho qui viendrait séparer la tête de son corps comme la gangrène qu'elle était. Prêt à débarrasser le monde du cauchemar qu'il représentait.

Mais alors qu'il était sur le point d'obtenir justice, d'assouvir sa vengeance et de bannir les démons qui le tourmentaient jusque dans ses rêves, sans jamais lui laisser un instant de répit, depuis ce qui lui semblait être des éons : une main vint agripper son bras. Comme une entrave sans aucune force dedans.

Il tourna la tête pour voir l'autre humain qui tenait l'Evoli dans le creux de son bras, et qui le retenait de porter son coup de l'autre.


«Il n'en vaut pas la peine.» Déclara-il simplement.


Cela n'était pas suffisant. Même s'il savait qu'il n'était qu'un déchet parmi les pires qui existait, il fallait qu'il paie pour ses crimes et tout ce qui lui avait fait subir. Mais devant son insistance à porter le coup de grâce, l'humain déployait de plus en plus de force à l'en empêcher, sans pour autant démontrer un quelconque signe de fatigue.

Ce qui eut rapidement fait d'attirer à nouveau l'attention du Kadabra. Il savait que cet humain là n'avait rien à voir avec celui vautré par terre, et qu'un simple coup d'œil lui fut suffisant pour comprendre qu'il était digne de confiance. Mais, tout aussi honnête et respectable qui soit, il n'allait pas laisser quiconque l'empêcher de réclamer sa vengeance sur cette ordure ; et ne pouvait même pas croire qu'il daigne tenter de préserver sa vie, alors qu'il savait à quel point il était corrompu.

Le Kadabra les avait tous téléporté hors de danger, et en retour le Lucario l'avait débarrassé de son bracelet. Ils étaient donc quittes, et n'avaient rien à se devoir l'un à l'autre. Cela n'empêchait pas l'humain de maintenir sa prise sur son bras. Alors, par simple considération pour le fait qu'il s'occupait aussi d'un autre pokémon qui avait souffert comme lui, il siffla à son attention un ultime avertissement avant de passer outre de force son entrave ; quitte à le blesser.

Malgré tout : l'humain ne bougea pas d'un pouce.

Véritablement à bout, aussi bien moralement que psychiquement, le Kadabra laissa le tranchant de sa coupe se répandre à tout son bras ; y comprit à l'endroit où l'humain maintenait sa prise. Du sang coulait de sa main alors que l'énergie psychique brute entamait sa chair, et se répandait le long de son bras. Le message était aussi clair que le danger qu'il représentait : lâche-moi ou tu va perdre ta main.

Il ne cilla pas d'un poil.

Qu'il fut impressionné par sa détermination ou interloqué par sa folie, le Kadabra retint son coup alors que l'humain ramenait son regard dans le sien.


«Il t'a volé un partie de ta vie, une partie de ton existence.» Commença-t-il sans relâcher sa prise un seul instant. «Il t'a volé ta liberté, privé de tes choix, bafoué ta fierté et traité comme un objet, un sujet de laboratoire, alors que chaque jour que tu passais avec lui était un enfer continuel du quel tu n'espérais jamais sortir.»

Il marqua un instant pour porter ses yeux d'ambre droit dans les siens ; un regard dépourvu de haine ou d'animosité, mais d'une détermination et d'une sincérité qui le figeait sur place.

«Et pourtant, malgré toute l'horreur que tu as subit : tu vaux toujours mieux que lui.»

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Il en restait silencieux : c'était si simple, si clair, si naïf, qu'il ne pouvait pas lui accorder crédit ; sa colère et sa soif de vengeance l'en interdisait… Mais c'était vrai, qu'il ne pouvait pas l'ignorer. S'il devait s'amener à se comparer à l'homme qui était au sol, il savait qu'il le surpassait sur strictement tous les points ; cela il n'en doutait encore moins que sa rage et son désir de vengeance.

Mais il conservait toujours sa lame brandit et prête à frapper. C'est là que l'humain intervint une ultime fois.


«Désormais tu es libre ; libre de choisir et de vivre à nouveau. Mais si tu le tues, tu donneras raison à tout ce qu'il t'a fait subir, et justifier tout ce pour quoi il prétend se battre, au détriment de ta vie et celle des autres. Il ne vaut pas la peine.»

Puis il le lâcha.

«Il ne te vaut pas.»


De la même manière que le Kadabra avait daigné l'avertir du danger menaçant sa main, l'humain lui renvoyait le gage en l'informant des conséquences de son acte et le laissant seul juge de son choix.

Plus rien ne le retenait d'assouvir sa vengeance. Il tenait la vie de son tourmenteur dans ses mains et pouvait la lui prendre à tout instant ; comme lui l'avait fait avec tout ceux qui se sont trouver malencontreusement sur sa route. Il pouvait le tuer, mettre fin à tout ça, assouvir sa vengeance et débarrasser le monde de ce fléau à tout jamais. Absolument rien ne pouvait l'en empêcher…

Mais ses mots lui revenaient dans son esprit alors qu'il réfléchissait à leur sens. Si cet humain avait pu lui faire vivre l'enfer, c'est parce que d'autres l'y avait conduit. D'autres qui, comme lui, n'aspiraient à rien d'autre que de répandre la terreur et la souffrance, et justifiaient leurs actes et leurs conséquences comme la seule issue qui soit. Donc celle à reconnaitre et accepter… Ce qu'il ferait, s'il le tuait.

Il n'était qu'un simple Abra qu'ils l'avaient arrachés à sa vie paisible dans la nature ; qu'il n'aspirait à rien d'autre que de vivre sa vie jour après jour en observant le monde. Mais au nom de leur soif de haine et de vengeance, toute cette partie de sa vie lui avait été arrachée, volée, bafouée, et tout ce à quelle tranquillité il aspirait piétinée et broyée sous ses yeux, tandis qu'ils l'avaient transformé en marionnette docile et serviable en le forçant à évoluer alors qu'il n'en avait pas le désir…

Il n'avait pas mentit : sa vie lui avait été intégralement volée ce jour là. Mais même volée, piétinée, gâchée, réduite à l'état de lambeau, elle valait toujours mieux que la leur ; celle de massacre et de carnage à laquelle ils aspiraient. Et aucune rage ou soif de vengeance, aussi terrible soit-elle, ne pourrait jamais lui retirer ça, ou l'amener à la lui retirer.

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La lame de son bras disparut alors qu'il le ramenait sur son côté, lentement. Devant le regard silencieusement approbatif de l'humain, et celui instinctivement soulagé du prisonnier. Mais ce dernier perdit à nouveau rapidement son souffle alors que le Kadabra continuait de le fixer intensément de cette même rage restée inchangée ; il ne pourrait jamais lui pardonner et cesser de le haïr. Mais il ne s'abaissera pas à le tuer.

Le jeune homme se remit en avant au devant du prisonnier, pourtant toujours juste derrière le Kadabra.


«Considère sa douleur comme ta douleur, sa peine comme ta peine, et sa rage comme ta rage. Jamais elle ne s'éteindra et restera vive comme au premier jour. Mais pourtant lui ne prétendra jamais que la fin justifie les moyens ; et c'est à ça que tu dois ta vie aujourd'hui.» Lui fit-il en indiquant le pokémon à ses côtés. «Souviens-toi de cet instant, de cette nuit ou l'être qui te haïssait le plus au monde t'as épargnée malgré toute sa haine, et prétends encore que ce que tu fais t'amèneras un jour à ce même résultat. Parce que ça ne sera jamais le cas.»


L'homme s'affala sur le sol, brisé intérieurement, alors que le Kadabra ne cherchait même pas à lui imposer les visions d'horreur qui lui avait fait subir en guise de compensation, et se contenta de lui tourner le dos avec dédain pour le faire disparaitre de sa vue ; préservant de la souiller d'avantage en la posant sur sa présence indigne.

Des années de préparations intensives. Des mois de recherches avancées et de collectes de ressource poussées. Tant de plans, tant de sueur, tant de sang versé pour amener la première partie de leur œuvre qui les mènerait à leur idéal à maturité, et espérer enfin faire changer les choses. Mais tout vola en éclat : sa base détruite en cendre, ses données pulvérisés, ses hommes capturés et ses ressources épuisées dans une suite d'échec sonnants et trébuchants. Pour finir lui-même capturé sur la base d'une petite crainte qui avait amené à la catastrophe ; la même peur qu'il accusait et pointait du doigt dans le système, et qui déclencha cette catastrophe.

Et alors qu'il semblait enfin que la mort vienne le rattraper pour qu'il paie ses crimes, des mains du bourreau le moins à même de devoir épargner sa vie selon son propre raisonnement, il retint l'exécution de sa vengeance pour le laisser affronter le plus terrible châtiment qui existe pour un être damné comme lui : vivre. C'était cela qui faisait que l'homme était brisé et incapable de continuer d'avantage : il avait tué, torturé, massacré, humilié, fait régner la peur et la haine le plus intensément possible dans le but d'accomplir ce qu'il croyait être juste. Et, à cet instant, il en constatait le résultat.

C'à n'avait servit à rien.

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«Mais qui êtes-vous…» Parvint-il à prononcer sur son dernier chant du cygne.


Le Kadabra s'était arrêté, lui aussi interpellé et intéressé de connaitre la réponse, mais ne se retournait pas pour voir celui qui pouvait répondre (au risque de voir celui qui l'avait posé.) L'Evoli fit de même en relevant la tête vers celui qui continuait de le tenir le plus gentiment possible avec son manteau, malgré le fait qu'il ressentait bien le froid et voyait son très fin pelage se hérisser en réponse pour le réchauffer, ainsi que le sang couler de sa main au sol. De même, alors qu'il connaissait déjà la réponse, le Lucario détournait le regard de son «siège» pour observer son partenaire de longue date en attendant sa réponse.

Alors qu'au dessus de lui, loin derrière, la dernière pièce qui venait effacer l'ombre du tableau, et à l'humain de répondre pour achever le chef-d'œuvre qui illuminait la nuit de sa pureté blanchâtre


«La relève de la nuit, et le jugement de la mort. Nous sommes Moon Dawn.»


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[Bonus. J'vais pas tout expliquer, mais : l'Ecclesiarchie, Tanith, l'âge de l'Apostasie et Sebastian Thor viennent aussi de W40K. Vous pouvez consulter leur historique sur la toile si vous le souhaitez, mais je ne vous l'explique pas car je garde le suspens de leur sens en réserve pour la suite.

Quand à Merlin… Disons que j'ai toujours eut un faible pour le conte de Walt Disney, et surtout sa chouette super tordante XD ]